Inauguration du grand orgue de Montréal d'Aude — Diocèse de Carcassonne & Narbonne

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Inauguration du grand orgue de Montréal d'Aude

Publié le 13/05/2024
Avec ses 3500 tuyaux, 57 jeux, 240 ans d'histoire et après trois ans de travaux minutieux, un véritable trésor patrimonial du département de l'Aude a repris vie le jeudi 9 mai dernier à Montréal. Plus qu'un simple instrument, c'est un monument historique qui a été restauré pour le plaisir des paroissiens, des habitants, et des invités venus d'ailleurs.

Le jeudi de l'Ascension a été marqué par un événement exceptionnel à l'église de Montréal d'Aude, avec la présence de Mgr Bruno Valentin, évêque de Carcassonne et Narbonne, ainsi que des autorités locales.

Un public nombreux a assisté à la bénédiction du grand orgue fraîchement restauré, suivi d'une messe solennelle. Cet orgue historique, qui résonne à nouveau après une période de restauration, a ajouté une dimension solennelle et émouvante à la cérémonie.

Monseigneur Bruno Valentin a plongé l'assistance dans une homélie totalement en phase avec l'événement du jour :

 A l’unisson des catholiques du monde entier, nous fêtons aujourd’hui l’Ascension, qui marque la fin de la présence visible de Jésus sur la terre, après sa Résurrection. Si Pâques était un orgue, comme celui qui s’éveille aujourd’hui dans cette collégiale, nous pourrions dire que l’Ascension est l’un de ses jeux : l’orgue de Montréal compte 57 jeux, 57 séries de tuyaux du même timbre de voix à la disposition de l’organiste pour déployer le chant de l’instrument. De la même manière, le chant de Pâques se déploie sur plusieurs « jeux » : la Cène du Jeudi Saint, la Passion du Vendredi Saint, le repos au sépulcre le Samedi Saint, la Résurrection elle-même, puis l’Ascension et la Pentecôte, sont autant de « timbres de voix » qui proclament un unique Mystère, celui de la mort et de la Résurrection de Jésus pour que la vie de Dieu soit offerte à tous.

Comme certains jeux d’orgue pris pour eux-mêmes, l’Ascension n’est pas le « jeu pascal » le plus facile à entendre : que faut-il comprendre de cette fête ? Certains tableaux, certains vitraux, semblent la résumer à un étrange numéro de trampoline à travers les nuages… Essayons plutôt de recueillir ce qu’en disent les lectures que nous venons d’entendre : il était question d’une élévation de Jésus, préalable à la diffusion de son Esprit, de son Souffle, sur ses disciples ; Il était question aussi que les disciples, portés par ce Souffle, annoncent ensuite le message de Jésus aux 4 coins du monde : « Vous allez recevoir une force quand le Saint Esprit viendra sur vous ; vous serez alors mes témoins (…) jusqu’aux extrémités de la terre ». (Ac 1,8). A sa manière, l’orgue décrit la dynamique de l’Ascension à partir des règles acoustiques de base sur lesquelles il est construit. La hauteur du son d’un tuyau dépend de la longueur de celui-ci : Plus un tuyau est long, plus il émettra un son grave. Or à intensité égale, un son grave se diffuse plus loin dans l’atmosphère qu’un son aigüe. Donc, dans l’orgue que nous réveillons aujourd’hui, les tuyaux qui montent le plus haut sont ceux dont la voix porte le plus loin.

 Voilà toute la dynamique de l’Ascension : l’élévation de Jésus au plus haut des cieux, auprès de son Père, est le préalable pour que sa voix porte jusqu’aux extrémités de l’espace et du temps. Et voilà peut-être une raison pour laquelle l’orgue reste, pour la liturgie, c’est-à-dire pour la prière des catholiques, « le roi des instruments » comme l’affirme tout le Magistère de l’Eglise. Avant d’être un instrument de concert, la vocation première de l’orgue est de servir la liturgie : servir sa beauté, servir sa vérité, en un mot servir sa sainteté, c’est-à-dire la capacité de notre liturgie à être un lieu de rencontre entre l’Homme et Dieu. La musique d’orgue est étroitement intégrée à nos célébrations, pour nous aider à nous élever, comme Jésus au jour de son Ascension, et à nous ouvrir à la présence de Dieu.

Mais au fait, pourquoi lui ? Pourquoi l’orgue en particulier ? Ce n’est pas qu’aucun autre instrument n’aurait droit de cité dans la liturgie, bien sûr. Cela tient plutôt à la composition particulière de l’orgue, qui en fait plus qu’un instrument, un témoin de notre foi, comme aimait à le dire le pape Benoît XVI, grand mélomane lui -même. Avec ses 3500 tuyaux, l’orgue de Montréal est capable de reproduire à peu près tous les sons de la création. C’est pourquoi il est d’abord une image de l’âme humaine : il exprime notre foi en l’être humain, notre foi en sa vocation fondamentale à dialoguer avec Dieu de tout son être. Aucun instrument mieux que l’orgue ne peut faire résonner la plénitude de nos sentiments, de la joie à l’angoisse, de la louange aux pleurs. L’orgue est en mesure de faire vibrer toutes les harmoniques de l’existence, tantôt en proclamant les merveilles de Dieu, tantôt en portant notre supplication, ou même notre tristesse face à la souffrance. Pensons à tous les moments de peine comme à tous les moments de joie des Montréalais que cet instrument a accompagné depuis sa création, à la fin du XVIII°s. Pensons surtout à ceux qu’il accompagnera dans l’avenir, en commençant par le mariage de Sixtine et Philippe dès demain ! Oui, l’orgue reprend la gamme infiniment variée des sentiments de l’âme humaine, pour les ouvrir à l’Espérance dans le souffle d’une prière. C’est cela qui en fait une musique inspirée.

Mais l’orgue reflète aussi une certaine image de Dieu : La grande variété de ses timbres en fait un instrument qui domine tous les autres, et exprime quelque chose de l’immensité et de la magnificence de la voix de Dieu, telles que la chante le Ps 28 par exemple : « La voix du Seigneur domine les eaux, le Dieu de la gloire déchaîne le tonnerre, le Seigneur domine la masse des eaux. Voix du Seigneur dans sa force, voix du Seigneur qui éblouit, voix du Seigneur : elle casse les cèdres. (…) Voix du Seigneur : elle taille des lames de feu ; voix du Seigneur : elle épouvante le désert. (…) Voix du Seigneur qui affole les biches en travail, qui ravage les forêts. Et tous dans son temple s'écrient : « Gloire ! » (Ps 28,3-7).

Finalement, l’orgue nous offre une image de nos communautés humaines : Dans un orgue, les nombreux tuyaux et les différents registres doivent former une unité. Si, ici ou là, quelque chose se bloque, si un tuyau est désaccordé, dans un premier temps la dissonance n’est perceptible que par une oreille exercée. Mais si plusieurs tuyaux ne sont pas correctement accordés, les fausses notes deviennent vite insupportables. Sensibilité aux variations de température, aux facteurs d’usure… toute la vie de cet instrument offre une bonne image de nos communautés ! Une main experte doit toujours reconduire dans l’orgue les discordances à une juste harmonie, comme cela vient d’être fait ici. Puisse cet instrument magnifique nous encourager à accueillir nos diversités dans la communion, et à trouver entre nous le juste accord pour la louange de Dieu et le service de nos frères.

Nous vous proposons un retour en images sur cette journée mémorable, témoignant de la richesse culturelle et spirituelle de ce moment.

Je consulte l'album photos de cette journée.