Voyage du pape François au Myanmar et au Bangladesh
Les enjeux du voyage apostolique en Birmanie et au Bangladesh
Plus qu’un voyage, une aventure ! Le directeur du Bureau de presse du Saint-Siège, Greg Burke, ne minimise pas la complexité de ce 21ème déplacement du pape François à l’étranger. Un vrai casse-tête diplomatique dans un contexte de crise. Première étape la Birmanie, qui vient tout juste de sortir d’une longue dictature militaire, mais où le respect des libertés publiques et des droits civils reste un défi important. Deuxième étape le Bangladesh, qui connaît une croissance économique favorable après des décennies de sous-développement, mais où des dizaines de millions de personnes s’entassent toujours dans des bidonvilles. Deux pays où les chrétiens ne sont qu’une infime minorité face à un écrasante majorité bouddhiste, dans le premier, musulmane dans le deuxième.
Deux pays, surtout, qui sont au cœur d’une grave crise humanitaire : l’exode, vers le Bangladesh, de la minorité musulmane Rohingya qui serait victime d’atrocités à grande échelle commises par l’armée birmane avec la complicité des milices bouddhistes ultranationalistes. Rohingya : un terme tabou que le pape a été invité à éviter de prononcer ; une requête pressante lui a été adressée par le premier et unique cardinal birman, Charles Maung Bo, archevêque de Rangoun depuis 2003, car cela risquerait d’attiser les tensions et d’affaiblir un peu plus le fragile gouvernement civil d’Aung San Suu Kyi. Un conseil que le Saint-Père semble avoir pris très au sérieux. C’est encore à la demande de l’Église locale, d’ailleurs, qu’il rencontrera l’influent chef de l’armée birmane. Son premier rendez-vous en Birmanie sera par ailleurs consacré aux responsables religieux du pays, une rencontre à caractère privé, ajoutée à la dernière minute au programme.
Un voyage pour soutenir les Églises locales
Le dossier délicat de la minorité Rohingya risque donc de phagocyter les enjeux de ce nouveau voyage pontifical vers les périphéries du monde. Pourquoi le Saint-Père a-t-il choisi de l’entreprendre ? Pour apporter son soutien aux Églises locales, répond Greg Burke sans la moindre hésitation. Parmi les temps forts de l’étape birmane : une rencontre avec le Conseil suprême des moines bouddhistes, tandis que le séjour du pape François au Bangladesh sera marqué par une rencontre interreligieuse pour la paix à laquelle participera une délégation Rohingya. Il ne s’agira pas d’une rencontre de prière, précise le Vatican, mais d’une succession de témoignages.
Autre temps fort : l’ordination au Bangladesh de seize nouveaux prêtres, un évènement rare dans un pays où les chrétiens ne représentent que 0,5% de la population et où l’islam est religion d’État. Les deux étapes s’achèveront chacune par une rencontre avec les jeunes et ce n’est pas un hasard : le pape veut souligner par-là que ces petites églises sont jeunes et dynamiques et qu’elles ont un avenir. Parmi les cadeaux qu’il ne manquera pas de recevoir comme à chacun de ses déplacements, il y en a un que le pontife argentin, attentif à toutes les pauvretés, ne manquera pas d’apprécier : une paire de sandales fabriquées par des enfants des rues.
Paix, pardon et réconciliation
Quant à la sécurité, au Vatican on s’est désormais résigné à affronter les risques, puisque le pape refuse de se déplacer en voiture blindée. Faut-il s’inquiéter pour autant ? Pas plus que d’habitude, laisse entendre Greg Burke. En revanche, il s’agit sans nul doute d’un voyage à haut risque pour la diplomatie pontificale, un exercice d’équilibriste. Quoiqu’il en soit, le pape François maintient son objectif : proclamer son message de paix, de pardon et de réconciliation, surtout dans les contextes les plus difficiles.
Par Romilda Ferrauto