Nécrologie pour l'Abbé Roger Barthès — Diocèse de Carcassonne & Narbonne

Aller au contenu. | Aller à la navigation

Outils personnels

Nécrologie pour l'Abbé Roger Barthès

Lors des funérailles de l'abbé Roger Barthès en l'église Saint-Joseph de Carcassonne, Père Didier Escoupérié partage quelques mots du Père Roger, une nécrologie d'une vie forte en aventure.

Passons sur l'autre rive...Où est votre foi ?

 

Deux invitations entendues de la bouche de Jésus, Deux invitations que notre ami et frère Roger laisse résonner dans notre cœur.

Roger Barthès est né dans une ferme modeste de Castelnaudary où ses parents faisaient vivre une famille de cinq frères et sœurs, Roger était le numéro trois, avec quelques vaches et une paire de bœufs pour le labour de quelques hectares. Voilà l'environnement familial.

Mais Roger, avec ses frères et ses sœurs ont respiré un autre environnement, l'ambiance religieuse du Lauraguais. Tout de suite, il a été dans l'atmosphère de l'église Saint François et surtout de l'abbé Pelouze qui savait réunir les garçons pour quelques rudiments scolaires. Le rayonnement de ce prêtre, d'origine rurale, bon vivant, a illuminé le coeur de notre Roger. Désormais, c'est cette vie de prêtre « tout à tous » qui va déterminer l'avenir du jeune Roger. Il veut devenir prêtre, il en parle à ses camarades, enfants de choeur comme lui. Je cite leur nom, parce que je les ai bien connus au Petit Séminaire de Castelnaudary, tout de suite après la fin de la dernière guerre en 1945. Ce sont : Louis Thomas, Joseph Vidal, Maynadier, Panouillé. Pour poursuivre son objectif, parce qu'il n'a pas fait de latin et mal dégrossis dans les autres matières, il entre dans la maison du Père Martin à Toulouse, pour rejoindre des garçons qui sont dans la même situation. C'est une maison « pour vocations tardives » disait-on. De cette maison, sortiront des prêtres pour le diocèse de l'Aude dont il m'est agréable de citer les noms : Ce sont : Joseph Soucail, Georges Daltin, Antoine Martinez, Paul Moulet. Mais, passons !

En faisant son service militaire en Algérie, il découvre la vie rude entre les copains dans ce pays avec toutes les incertitudes et les peurs. Un jour, son unité en déplacement, tombe en embuscade, Une balle tue net son camarades à côté de lui et ce fut une question qui l'a obsédé toute sa vie : « pourquoi, m'a-t-il dit souvent, lui a été tué à côté de moi, et moi, pas ? » Que de fois nous avons parlé de l'Evangile où l'on voit deux frères vivant ensemble et où il est dit : l'est pris et l'autre reste...La question est toujours restée.

J'ai toujours admiré la volonté de Roger pour poursuivre malgré les difficultés, pour se tenir à un bon niveau d'études. Il m'a quelquefois abordé pour me dire dans sa simplicité ; « dis-moi, explique-moi, je n'y comprends rien » ou « toi qui es de la ville, explique-moi… » sous-entendu : nous ne sommes pas de même milieu, mais on peut se comprendre.

Il m'invite un jour à la ferme de sa famille. J'ai vu et j'ai mieux compris son être profond : un rural, vivant avec un minimum comme beaucoup de familles de la terre lauraguaise. Mais le cœur accroché à la pratique religieuse. Il revendiquera toujours sa ruralité au ras de terre.

Mais passons, comme il disait souvent. Il sera ordonné prêtre à 29 ans, deux ans après moi. Nous nous retrouverons à la cathédrale Saint Michel de Carcassonne, avec l'abbé Laffon comme archiprêtre. Il commence sa vie de jeune prêtre. Voici, par exemple, l'activité du dimanche : 7 heure, messe à jeun ou presque, que je célèbre, - 8 heure, 2ième messe, qu'il célèbre - 9 heure : messe des enfants -10 heure, messe des chanoines - 11 heures grand- messe avec beaucoup d'ambiance - et le soir : adoration, salut du Saint Sacrement et messe. En tout : 6 messes! Je ne fais pas de comparaison avec aujourd'hui ! Il découvre la JOC avec un prêtre qui vient de mourir récemment : Jean Laux. Il ne restera pas longtemps. Mais dorénavant, il aura une seule règle de vie, celle des grands saints et de Charles de Foucauld qui sera canonisé en mai prochain : » l'apostolat de de la bonté ». Je sais que c'est une image qui parle à beaucoup d'entre vous ! Ainsi, il s'engagera dans la ligue antialcoolique, la Vie Libre : ne plus boire de vin pour rejoindre les accros à l'alcool dans leurs efforts pour s'en sortir.

Mais passons comme il disait. Sa dernière nomination date d'il y a quinze ans C'est ainsi qu'il est envoyé à l'église Saint Joseph avec la chapelle saint Charles où sera son presbytère avec neuf villages. Je voudrais évoque trois évènements :

Il y a dix ans, à la messe de la veille de Pentecôte, deux jeunes de quatorze et dix-huit ans, entrent dans cette église et jettent des pierres sur l'assemblée réunie. Les Journaux ont parlé de « caillassage » qui n'a fait heureusement aucune victime. Il en a été profondément affecté pendant longtemps.

Dans cette nomination, il y avait neuf villages : » je suis content qu'on m'est donné des villages : j'ai découvert qu'un évêque avait mis un séminaire à Mas des cours à la campagne », disait-il en riant ! Mgr de Bezons, celui du Carrefour et de la préfecture. Parce qu'il y avait trouvé une maison libre pour des séminaristes venant tous du milieu rural. Après la Révolution, le Séminaire sera dans l'actuelle école de Jeanne d'Arc.

Mais, passons encore !!! et cette fois pour aller sur l'autre rive : Il sait qu'il est atteint d'une maladie incurable. Il prend la barque des résidents de Béthanie et va se laisser aller au gré de l'évolution qui va le conduire sur les rives du Royaume de Celui qui l'a ébloui un jour, grâce à l'abbé Pelouze, le prêtre de son enfance et de sa jeunesse.

 

Père Didier Escoupérié